Le Blog de Charles Kabuya

Les soldats de l’armée congolaise n’ont pas de visage, car nous n’avons aucune relation affective avec notre armée. En effet, historiquement l’armée congolaise est héritière de la Force Publique coloniale qui avait une fonction répressive sur les populations. Après l’indépendance, elle a joué un rôle néfaste durant les événements tragiques des années soixante. Ensuite elle a été au service d’un régime autoritaire durant trois décennies. Tout cela fait que le congolais s’est toujours méfié de son armée et que sa relation est très ambiguë avec une institution souvent impliquée dans des faits d’actualité tragiques (pillages, viols etc.)

En dehors des rebellions internes, notre pays n’a jamais connu de véritable péril extérieur. Mais aujourd’hui, avec les groupes armés qui sévissent à l’est du pays, dont des groupes étrangers et d’autres téléguidés depuis l’étranger, nous sommes en présence d'une véritable entreprise de
déstabilisation de notre pays, à laquelle notre armée doit faire face dans les conditions difficiles que l’on sait : solde minable, logistique inefficace, trahisons dans la chaîne de commandement etc.

Mon hommage ne s’adresse pas au commandement, mais au simple soldat : ce jeune homme, cette jeune femme, qui a choisi d’intégrer l’armée congolaise, qui mène une vie misérable, qui se fait trouer la peau actuellement sur le front de l’est pendant que, nous autres, nous sommes assis
tranquillement dans nos fauteuils et que nous faisons du bruit sur les réseaux sociaux. Je me dis que ce jeune homme, cette jeune femme pourrait être mon frère ou ma sœur, mon voisin ou ma voisine.

Je rends hommage à son courage patriotique, car lui au moins il prend le risque de verser son sang pour son pays, et il n’attend rien de son pays en retour, que de l’ingratitude : mal aimé, mal rétribué, abandonné lorsqu’il est blessé à la guerre, sa veuve et ses enfants chassés du camp lorsqu’il meurt au combat…

Soldat inconnu et sans visage, reçois mon hommage…