QUE PENSER DE L'AUGMENTATION DES DEMANDES D'ASILE DES CONGOLAIS EN BELGIQUE ?
Selon les chiffres annoncés par le directeur de l'Office des étrangers belges, les demandes d'asile des ressortissants congolais ont connu une augmentation significative depuis 2023, avec une moyenne de 100 demandes par mois et elles ont atteint pour toute l'année 1250 candidatures à l'asile politique.
La question relative aux demandes d'asile recouvre plusieurs réalités lorsqu'il s'agit des migrants africains.
Si les conflits armés, les discriminations socio ethniques et la répression politique caractérisent beaucoup de pays africains, il est un secret de polichinelle que la pauvreté, le chômage et la précarité économique sont les causes principales qui poussent de nombreux jeunes africains à partir sur les routes migratoires à la recherche d'une vie meilleure, en particulier vers l’Occident.
Les congolais n'échappent pas à ce phénomène qui cause chaque année des drames humains sur les mers ou encore dans le désert, et entraîne parfois des familles avec enfants à prendre des risques pour traverser clandestinement des frontières terrestres et maritimes.
La RDC sort d'une période d'instabilité consécutive au changement de pouvoir politique en 1997, suivie de conflits armés presque sans répit, occasionnant une profusion de groupes armés dans la partie orientale du pays.
Les difficultés économiques et l'explosion démographique que connaît ce pays, peuplé de plus de 100 millions d'habitants et qui sera un des pays les plus peuplés d'Afrique à l'horizon 2050, constituent un cocktail proprice à une émigration relativement massive.
Si l'ampleur du phénomène était prévisible au regard des paramètres socio-économiques, quelle serait la part du politique dans tout cela ? Car il est question de l'asile politique en Belgique où ce constat a été fait.
Il faut dire d'emblée que la RDC dispose d'un des espaces politiques les plus ouverts sur le continent africain.
Les libertés publiques y sont exercées plus que dans la plupart des pays voisins, notamment en ce qui concerne le droit d'expression. Il suffit de faire un tour sur les réseaux sociaux congolais pour se rendre compte de la manière immodérée dont ils usent de cette liberté. Les critiques virulentes, l'impertinence, les sarcasmes et aussi les insultes vulgaires sont impunément adressées aux autorités publiques, y compris au Chef de l'état en personne. La répression de ces actes, qui tombent souvent dans le champ de l'incivisme visé par la loi, est très rare.
Quant à l'opposition politique, elle exerce pleinement son droit de critique. D'ailleurs beaucoup de ténors de l'opposition disposent de leurs propres médias (chaînes de télévision, radio etc.)
On notera cependant une certaine crispation des services de sécurité d'état depuis quelques temps. Elle s'est traduite par quelques interpellations à caractère politique, parfois sous le régime du secret qui fut décrié autrefois. Manifestement cette crispation serait liée à la situation sécuritaire du pays, dont il faut rappeler qu'il est en guerre dans la partie orientale suite à des agressions rwandaises récurrentes et prédatrices, provoquant le déplacement de près de 3 millions d'habitants qui forment une masse pathétique de réfugiés internes.
La médiatisation de cette situation malheureuse que vivent les populations dans l'est du pays et l'exploitation habile des bavures des services offre de la “matière” aux réfugiés économiques congolais qui peuvent y puiser de quoi crédibiliser leurs récits à l'appui des demandes d'asile.
Ainsi, nous assistons à un double phénomène, qui est l'accroissement du nombre des réfugiés congolais, lié à une situation socio-économique précarisée par plusieurs facteurs consécutifs à l'histoire récente du pays, d'une part ; et une exploitation plus ou moins opportuniste de certains cas réels d'abus sécuritaires pour étayer les demandes d'asile politiques, d'autre part.
Il faut également souligner que les victimes réelles des violences meurtrières qui sévissent dans l'est du pays ont généralement beaucoup moins l'opportunité de pouvoir émigrer hors du continent africain. La plupart sont des déplacés internes qui se retrouvent dans des camps de réfugiés à plusieurs kilomètres de leurs agglomérations d'origine. Seuls quelques-uns arrivent à se réfugier dans les pays limitrophes.
En conclusion, ce phénomène ne peut être décrit à la lumière des seuls paramètres politiques, si on doit considérer qu'il s'agit de réfugiés politiques stricto sensus.
Il y a une part évidente se rapportant une amplification opportuniste de la part des candidats à l'asile politique en Belgique.
Et cela vaut pour tous les pays occidentaux qui reçoivent des demandes d'asile.
Me Charles Kabuya
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