RDC: POURQUOI REMETTRE AU LENDEMAIN CE QU'ON PEUT FAIRE AUJOURD'HUI ?
Après l'inauguration de la nouvelle aérogare de N'djili à Kinshasa, les réactions ont été nombreuses sur les réseaux sociaux, certaines positives car notre aéroport, construit par les belges en 1953, n'était plus aux normes internationales; d'autres négatives, critiquant la modicité du projet. Si les différentes réaction confirment une chose, c'est que chaque peuple, chaque pays a besoin d'une vision de grandeur, d'une exaltation nationale. Singulièrement notre pays en a encore plus besoin après des décennies de recul, de record dans les statistiques négatives, avec une place de choix dans les bas fonds des classements socio-économiques. Sans parler de toutes les humiliations subies dans les pays limitrophes.
La réalité est que notre pays commence à peine à se stabiliser au niveau des indicateurs macro-économiques et qu'il possède l'un des budgets les plus faibles dans sa catégorie en Afrique (pour exemple, nous plafonnons à 7 milliards Usd alors que l'Angola est à plus de 50 milliards Usd) Cette situation a pour corollaire le fait que nous avons peu de latitudes en matière économique et que notre capacité d'endettement est faible pour financer notre économie. C'est pourquoi j'ai tout de même félicité le gouvernement pour cet effort de modernisation de l'aérogare de N'djili.
Cependant, je suis réservé sur le choix peu ambitieux qui a été fait alors que le secteur aérien est une niche de choix pour notre pays. Je reste convaincu que pour le même budget on pouvait faire mieux qu'un ouvrage aussi basique et précaire. Est-ce que l'entreprise française Alpha Aéroport, à laquelle a été confiée cette construction, était le "mieux disant" des soumissionnaires à l'appel d'offre? En effet on peut se demander si ce choix ne présentait pas un avantage diplomatique en nous attirant les bonnes grâces de Paris à un moment donné... Cette entreprise a d'ailleurs cumulé des retards dans la livraison de l'ouvrage, au point que le premier ministre n'avait pas caché son agacement lors d'une visite du chantier.
En face, à l'aéroport de Maya-Maya de Brazzaville, c'est une entreprise chinoise, Weihai International Economic & Technical Cooperative, qui a réalisé cette aérogare magnifique, comportant entre autres un hôtel 5 étoiles, ayant la capacité d’accueillir le plus gros porteur actuel (Airbus A380) et pouvant traiter plus de 2 millions de passagers par an, pour une ville qui compte à peine un million d'habitants... D'où vont venir tous ces passagers? Eh bien, il est clair que Brazzaville se positionne pour devenir un hub (base régionale) pour plusieurs compagnies africaines et internationales. C'est ce que nous n'avons pas compris
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Nous n'avons pas les infrastructures compétitives pour attirer les grandes compagnies chez nous et faire de Kinshasa le hub de l'Afrique centrale qu'il mérite d'être. Et pourtant nos atouts sont considérables: plus de dix millions d'habitants dans la capitale, une demande potentielle importante du transport aérien dans l'arrière pays où les infrastructures routières sont souvent inexistantes, la possibilité d'exporter des produits agricoles avec le marché international qui sera construit non loin de l'aéroport etc... C'est un énorme challenge promettant des retombées économiques considérables pour le pays.
Construire des infrastructures aéroportuaires ambitieuses n'est pas une question d'orgueil, même s'il ne faut pas négliger l'aspect "vitrine du pays" qu'elles représentent. C'est une stratégie économique porteuse, dans laquelle s'est inséré un pays comme l'Ethiopie avec sa compagnie Ethiopian Airlines. Pourtant c'est un pays qui est sur le papier plus pauvre que le nôtre...
Les choses bougent autour de nous. A l'est du pays, le Rwanda est en train de construire un aéroport international dans la ville de Kamembe, située en face de Bukavu. Ce pays a compris l'intérêt qu'il avait à capter toute la clientèle du Sud-Kivu qui ne bénéficie pas d'un aéroport digne de ce nom et qui passe actuellement par Kigali pour aller à l'étranger.
Lorsque je voyage à Kinshasa avec certaines compagnies internationales, je me rends compte qu'à chaque fois Brussels Airlines fait son plein de kérosène à Luanda, et que Royal Air Maroc et Ethiopian font eux leur plein à Brazzaville. C'est un manque à gagner pour notre aéroport et le signe le plus patent que ces pays sont déjà des hubs pour ces compagnies.
Mais il n'est pas trop tard pour réveiller le géant que nous sommes et qui a tendance à sommeiller depuis longtemps...
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