Le Blog de Charles Kabuya

TRAHISON...


Il y a une question qui m'interpelle en tant qu'être humain, natif du Congo, ex-colonie belge.
Les belges ont pris possession du territoire qui est devenu le Congo à la fin du 19e siècle.
Ils ont exploité ce pays dont nous avons aujourd'hui la charge, avec les mêmes richesses, le même potentiel de développement.


Mais, eux, ils ont tracé des routes et construit des chemins de fer à travers forêts et savanes, jeté des ponts sur les rivières ; ils ont créé des villes et des agglomérations urbaines. Tout cela avec les technologies moins performantes de l'époque.

 

Bien-sûr que la colonisation était criminelle, meurtrière et avilissante. On est tous d'accord qu'il fallait y mettre fin, c'est incontestable !

Donc, après 80 ans nous les avons fait partir, au prix de beaucoup de sacrifices.


Sauf qu'en 60 ans nous avons détruit tout ce qu'ils avaient laissé comme infrastructures.
Aucun kilomètre de voie ferrée n'a été ajouté, au contraire ceux qui existaient ont même disparu. Sans parler de notre incapacité de prolonger jusqu'à Kinshasa le chemin de fer du Katanga, qui s'arrête à Ilebo, pour le connecter à la voie de chemin de fer de Kinshasa-Matadi. Cette dernière fut taillée à coups de pioches dans les rochers du bas fleuve et sa construction a coûté la vie à des milliers d'ouvriers congolais, africains, et même chinois. Tous ces morts, toute cette souffrance humaine pour rien, car aujourd'hui elle est à l'abandon ; alors qu'elle peut nous permettre de disposer d'une voie nationale pour évacuer nos minerais et autres produits à l'exportation par nos ports (quid du port en eau profonde ?)


Malgré les moyens technologiques modernes de notre époque, nous n'avons créé aucune ville nouvelle depuis l'indépendance, pas d'autoroute ; nous avons un réseau routier rudimentaire qui laisse enclavées des provinces entières.
Les voies fluviales qui avaient facilité la circulation des personnes et des biens, et concurru à l'extension de l'administration des territoires, sont sous-exploitées. Le vaste et exceptionnel réseau fluvial est non entretenu.

 

Notre potentiel de développement est rendu inutile, car non mis en valeur au profit de nos populations.
Nous vivotons en théorie, en évoquant nos richesses potentielles, offrant des tentations à nos ennemis et aux prédateurs.

 

Nous avons trahi nos ancêtres qui, à la force de leurs bras et sous les coups de chicotte, ont tracé les routes à travers les forêts infestées de moustiques et de mouches tsé tsé, bâtis des villes, posé les traverses des voies ferrées, récolté leur quota de caoutchouc sous peine de se voir mutiler...

 

Nous avons détruit le fruit de leur travail de forçats, le fruit de leur peine d'esclaves, et cela sans être capables de faire mieux pour les honorer.

 

Nous les avons trahi, nous sommes des traîtres à leur mémoire...


Nous sommes leurs descendants indignes !

 

Charles Kabuya

 



08/05/2024
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