Le Blog de Charles Kabuya

RDC: UNE NOUVELLE GÉNÉRATION COMPLEXÉE PAR LE RWANDA ?

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Depuis quelques temps on observe avec beaucoup de tristesse qu'une certaine intelligentsia congolaise est en train de se transformer pratiquement en groupies de Paul Kagame. Pour justifier leur engouement qui frise le fanatisme béat, ils s'appuient sur les réalisations et les performances économiques dont les dirigeants rwandais se prévalent.

 

Sauf que si ces performances sont, certes, appréciables, elles sont tout aussi fortement contestées par beaucoup d'économistes. Il y a énormément de communication dans la stratégie internationale du dirigeant rwandais, comme on vient de le voir avec le récent sponsoring du club anglais d'Arsenal. Or, selon ces observateurs, l'arrière cours ne ressemblerait pas à la vitrine Kigali, qui serait un véritable village Potemkine.

 

Sur le plan politique, ces mêmes compatriotes louent ce qu'ils appellent "le leadership de Kagamé", alors que sa présidence est essentiellement caractérisée par une conduite dictatoriale des affaires de l'état, l'absence d'un espace des libertés publiques, l'emprisonnement et les assassinats d'opposants, et enfin et surtout par l'instrumentalisation de la constitution pour se maintenir indéfiniment au pouvoir.

 

Le plus paradoxal dans cette étrange attitude de ces compatriotes c'est que toutes ces caractéristiques du fameux "leadership" de Kagamé sont combattues par ces mêmes personnes chez nous en Rdc, mais elles sont ravalées aux petits détails qui méritent d'être occultés quand il s'agit de leur "idole".

 

Sont-ils partisans de la "dictature éclairée"? Sont-ils prêts à s'asseoir sur leurs libertés ici au Congo en échange d'un "leadership" similaire? Et surtout, n'y a-t-il pas une indécence chez ces personnes lorsque leur attitude revient à s'asseoir sur la mémoire de nos compatriotes victimes des ingérences militaires de leur idole dans notre pays?

 

Mais ce questionnement n'est pas le but de mon propos. J'observe que beaucoup de congolais développent de plus en plus une forme de complexe d'infériorité. Ils sont à l'affût de tout ce qui se passe au Rwanda et s'en servent pour se plaindre à longueur de journée, dénigrer et railler leur propre pays. Pendant ce temps, les rwandais, eux, ne nous "calculent" pas, comme on dit. Ils s'occupent de leurs oignons. Si Kagamé a réussi une chose, c'est d'avoir inoculé ce complexe aux congolais.

 

J'ai passé une partie de mon enfance au Kivu, dans le sillage de mon père qui fut affecté dans la région par une institution étatique à l'époque de Mobutu. Je me souviens que la situation était inverse, les rwandais et les burundais couvaient un complexe d'infériorité vis-à-vis des zairois. Je me souviens aussi que dans mon enfance les parents interdisaient à leurs enfants d'aller lorgner chez les voisins ou de les envier. Ils devaient être fiers de ce qu'ils étaient, même si leurs parents étaient plus pauvres que ceux des voisins.

 

Foutons la paix aux rwandais, arrêtons de ressasser leur actualité, occupons nous de nos oignons et mettons nous au travail, car notre challenge de développement est plus complexe que celui d'un état qui a la dimension de la moitié du Nord-Kivu. Quand vous construisez 50 kilomètres de route au Rwanda vous avez construit une route nationale, tandis qu'en Rdc vous êtes à peine sorti des faubourgs de Kinshasa, et vous n'avez même relié deux villes dans une même province...
Comme quoi, il y a du taf autrement plus dimensionné...

 

Ce complexe n'a pas lieu d'être. Les jeunes générations l'ignorent peut-être, mais le prestige international, le Congo (Zaïre) l'a connu. Que ce soit en matière diplomatique, économique ou culturel. N'avons-nous pas eu l'une des plus prestigieuses compagnies aériennes en Afrique et l'une des meilleures équipes de football? Parmi les meilleures universités africaines on comptait Lovanium et l'université de Lubumbashi qui ont formé plusieurs cadres venus des pays voisins (dont les rwandais). D'ailleurs nous possédons toujours le premier réacteur nucléaire de recherches en Afrique noire. Nos instructeurs militaires étaient parmi les meilleurs en Afrique etc...

 

Je ne voudrais pas que l'on pense que je suis en train de ressasser un passé qui aurait été plus "glorieux" que le présent, alors que c'est le présent et l'avenir qui comptent. Non, je ne suis pas nostalgique. Mon propos vise à faire comprendre aux plus jeunes, qui sont exposés à la propagande ou à la communication des voisins et aux stratégies de prédation, de ne pas douter d'eux-mêmes ni de leur pays. Ce que les aînés ont pu réaliser dans un passé récent, ils peuvent l'accomplir au centuple dans un proche avenir...
Ce n'est qu'une question de volonté et d'organisation.

De grâce, cessons d'envier les autres. Dans nos villages, envier quelqu'un ça s'appelle "la sorcellerie", ne soyons pas des "dongolo miso..."

 

Charles Kabuya 



25/05/2018
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